Culture

L’enfer à cinq


Émile Godin

18 octobre 2024

Avec l’incroyablement rapide évolution de l’intelligence artificielle que nous vivons actuellement, il est pertinent de parler d’œuvres du passé qui abordent cette technologie. C’est le cas de « Je n’ai pas de bouche, mais il faut que je crie ». Une nouvelle de science-fiction horrifique écrite par Harlan Ellison en 1966.  Désormais culte, elle a su marquer les esprits grâce à sa représentation de la souffrance, ses thèmes complexes bien développés et son message politique.

Cette œuvre raconte l’histoire d’un monde postapocalyptique dans lequel M. A., une intelligence artificielle ultra-avancée, a tué l’entièreté de la race humaine sauf cinq personnes. Ces dernières sont rendues immortelles et gardées prisonnières dans une simulation pour qu’elles puissent être torturées éternellement. En seulement douze pages, Ellison parvient à construire un monde dénué de tout espoir dans lequel nos cinq protagonistes feront face aux pires épreuves qu’ils pourraient rencontrer.

Tout d’abord, cette nouvelle excelle dans sa représentation de la souffrance. On ressent très bien l’impact que les supplices de M. A. ont sur les personnages. Cela est dû au fait qu’au lieu de décrire trop graphiquement la torture physique, l’auteur met l’accent sur l’effet psychologique que cette dernière cause. On peut donc bien observer le désespoir des protagonistes face à la situation. Ce désespoir donne au lecteur un sentiment de malaise et de terreur percutant qui donne au récit son côté horrifique.

Ensuite, la nouvelle aborde aussi plusieurs thèmes qui portent à réflexion. Par exemple : la religion. En effet, le rapport entre l’IA et les humains est celui d’un dieu en colère contre ses créatures. Ces dits humains sont donc amenés à remettre en question leur conception de dieu, car si dieu est bon, pourquoi les ferait-il tant souffrir? Ils en viendront ensuite à rejeter toute autre croyance et à accepter M. A. comme l’unique dieu pour arrêter d’espérer futilement un miracle qui les sauvera. Et ce là n’est là qu’une des manières dont le récit aborde ses thèmes.

Finalement, Ellison arrive à faire passer un message politique. En effet, c’est l’escalade d’un conflit armé mondial qui a mené à la création de M. A. L’auteur passe son message: les avancées technologiques, surtout en temps de guerre, peuvent être dangereuses. Un message bien ancré dans la réalité puisque les deux guerres mondiales ont mené à de grands progrès scientifiques, mais ces progrès ont souvent fait bien des morts. La nouvelle ayant été écrite durant la guerre froide où la menace de l’arme nucléaire, justement inventée durant la Deuxième Guerre mondiale, était plus présente que jamais. En remettant l’œuvre dans son contexte, on donc peut y donner une nouvelle interprétation.

En conclusion, « Je n’ai pas de bouche et il faut que je crie » est une œuvre aux multiples facettes qui sait captiver et terrifier le lecteur. Sa courte durée et ses thèmes intemporels la rendent facile à lire. Alors, pourquoi ne pas y jeter un coup d’œil ?

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